Feuillet d'information pour l'étude de Lodge et al., publié dans le journal Cell Reports , Oct 2017
Des échantillons sanguins et biologiques, généreusement fournis par des volontaires anonymes séronégatifs, nous ont permis d'isoler des macrophages et d'étudier comment ces cellules peuvent résister à l'infection par le virus. Les macrophages sont des cellules qui peuvent survivre longtemps après avoir été infectées et, lorsqu'infectées, ne produisent que de faibles quantités de virus. Les macrophages peuvent également s'infiltrer dans de nombreux organes, et ainsi être un « réservoir » de VIH. Les réservoirs sont des cellules ou des tissus où le VIH est capable de se cacher et de persister à l'état dormant, même si une personne prend un traitement antirétroviral efficace et une charge virale indétectable. Nous avons constaté que les macrophages peuvent résister à l'infection par le VIH en utilisant le microARN. Ces petits ARN sont générés par la cellule et sont connus pour réguler les processus cellulaires de base au maintien de la santé et peuvent être intégrés dans certaines maladies. Deux microARN, 221 et 222, inhibent l'infection par le VIH des macrophages en améliorant le taux de CD4, la molécule qui permet au VIH de s'accrocher pour entrer dans les cellules. Ces résultats ont été publiés dans la prestigieuse revue Cell Reports en octobre 2017.
1) Qu'est-ce que notre étude démontre ?
Les macrophages en culture cellulaire dérivés de monocytes sanguins ne sont pas efficacement « infectables » par le VIH. Le but de cette étude était de découvrir comment les macrophages résistent au VIH. En utilisant des techniques hautement spécialisées, nous avons séparé en laboratoire les macrophages résistants au VIH de ceux sensibles au VIH. Puis, en utilisant une nouvelle technologie, nous avons comparé les différentes quantités de microARN dans chaque population. Les microARN sont de petites molécules qui contrôlent l'expression des gènes et des protéines. Des niveaux élevés de microARN-221 et -222 ont été trouvés dans la population résistante au VIH, ainsi que dans les macrophages « activés » résistants au VIH. Ces microARN désignaient la quantité de CD4, le récepteur par lequel le VIH pénétrait dans les cellules, les délivrant donc moins susceptibles au virus.
2) Comment cette étude est-elle reliée à une guérison du VIH ?
Alors que la thérapie antirétrovirale a généralement réussi à contrôler la charge virale chez les personnes infectées par le VIH et à prévenir leur progression vers le sida, les antirétroviraux actuellement disponibles n'éliminent pas complètement toutes les cellules infectées par le virus. En effet, une très petite quantité de virus reste en dormance, cachée dans les réservoirs du VIH, et est capable de relancer la réplication du virus si la personne vivante avec le VIH interrompt son traitement. Ainsi, la recherche pour la guérison doit cibler les réservoirs cellulaires tels que les macrophages infectés par le virus : de nombreuses recherches se concentrent actuellement sur l'infection par le VIH dans des organes tels que le côlon et le cerveau, des organes qui semblent abriter des macrophages infectés par le virus. Comprendre comment certains macrophages deviennent résistants à l'infection guidera les stratégies futures visant à limiter l'établissement de réservoirs dans les macrophages.
3) Pourquoi les échantillons de patients sont-ils importants pour cette recherche ?
Ce projet n'aurait pas été possible sans la participation de volontaires. Les monocytes ont été isolés à partir d'échantillons de sang donnés et des macrophages ont été obtenus de ces dons, nécessaires à nos études. Nous avons également eu la chance d'avoir accès à des échantillons de sang assortis aux biopsies de côlon correspondants, provenant d'un certain nombre de participants séronégatifs ; ces échantillons nous ont permis de faire le lien entre les niveaux élevés de microARN-221 et une plus grande résistance au VIH dans les macrophages intestinaux, ces derniers représentant un contexte plus authentique et pertinent.
4) Qu'est-ce qui a été appris ? Quelle est la suite ?
Cette étude a montré que les microARN inhibent l'infection par le VIH-1 des macrophages. Les microARN sont des régulateurs de gènes importants qui sont potentiellement impliqués dans plusieurs aspects de l'infection par le virus. Ici, nous nous sommes concentrés sur leur rôle en tant que facteurs antiviraux qui limitent l'infection par le VIH des macrophages, qui sont des cellules qui font partie du réservoir. Il reste encore beaucoup à apprendre des microARN et de leur utilisation potentielle pour cibler les réservoirs et pour purger les cellules infectées par le VIH du corps. Des stratégies qui amélioreraient la synthèse des microARN 221 et 222 dans les macrophages rendraient ces cellules résistantes à l'infection à VIH et limiteraient l'établissement du réservoir de VIH.